Les invitations officielles ne sont pas encore lancées, car les agendas des participants sont complexes à coordonner. Mais la France souhaite organiser le 21 décembre une deuxième conférence sur le Proche-Orient, après celle du 3 juin. Contrairement à des rumeurs relayées par la presse israélienne ces dernières semaines, l’Elysée n’a pas renoncé à cette initiative. L’objectif est de refuser l’acte de décès de la solution à deux Etats et de mobiliser les bonnes volontés, parmi les puissances qui comptent, pour encourager les protagonistes. Mais le contexte est extrêmement défavorable et les attentes sont minimes, d’autant que la visibilité demeure nulle sur les intentions américaines.
L’envoyé spécial de la France, Pierre Vimont, a multiplié les déplacements auprès des différents acteurs de ce dossier impossible. Le diplomate était récemment à Moscou, à Washington et au Caire, et s’est entretenu avec les Jordaniens.
Trois groupes de travail ont été mis en place après la conférence de juin. Le premier s’est penché sur les conditions de l’émergence d’un Etat palestinien ; le second, sur les incitations économiques pour les protagonistes, notamment de la part de l’Union européenne ; le troisième, sur le dialogue avec les ONG et la société civile. Leurs propositions devraient être adoptées au cours de la réunion du 21 décembre, pour exprimer un consensus.
Il s’agit aussi de donner de la matière à la future administration Trump, dont les intentions au Proche-Orient demeurent nébuleuses. Le président élu s’est engagé à déménager l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem, ce qui serait une cassure dans la ligne diplomatique de son pays depuis des décennies. Mais aucune confirmation n’est encore tombée
Rejet de l’initiative diplomatique française
Benyamin Nétanyahou fait preuve d’une prudence inhabituelle, retenant son souffle avant l’entrée en fonction de Donald Trump, dont l’entourage est pro-israélien. Le premier ministre a rejeté sans surprise l’initiative diplomatique de la France, refusant toute participation israélienne à la deuxième conférence.
Paris cherche une façon de transmettre les résultats de la prochaine réunion aux deux protagonistes du conflit, en les invitant en dehors de l’enceinte où prendront place la trentaine de participants, ou bien en dépêchant un représentant, à Ramallah et à Jérusalem, dans les jours qui suivront.
Mais l’attention de M. Nétanyahou est plutôt focalisée sur Washington. Depuis des mois, les spéculations vont bon train au sujet de la volonté de Barack Obama de prendre une ultime initiative dans ce dossier, qui constitue l’un de ses échecs en matière de politique étrangère. Plusieurs hypothèses ont circulé. Un simple discours, fort en symboles mais vide de conséquences. Un soutien ou une abstention au Conseil de sécurité de l’ONU sur une résolution dénonçant la colonisation israélienne en Cisjordanie.
En 2011, Washington avait brandi son veto contre un texte de cette nature. Les Palestiniens souhaitent à nouveau déposer un projet similaire, mais leurs alliés arabes expriment des réserves sur le calendrier, qui ne serait pas favorable. Le comité de la Ligue arabe (Maroc, Egypte, Autorité palestinienne, Jordanie) se réunira après le 15 décembre pour prendre position.
Impuissance américaine
Enfin, la dernière option possible, la plus audacieuse, eut été pour Washington de déposer au Conseil de sécurité un projet de résolution gravant dans le marbre les paramètres d’une solution négociée au conflit israélo-palestinien. Mais au Quai d’Orsay, le scepticisme règne. « L’administration américaine est moins tentée de prendre une initiative qu’avant l’élection de novembre, dit un diplomate. Obama souhaite une transition calme et sereine, même si John Kerry aimerait beaucoup faire quelque chose. »
Le secrétaire d’Etat, à la fois passionné et exaspéré par ce dossier, n’a pas fait dans la langue de bois lors du forum Saban à Washington, le 4 décembre. Il a reconnu une forme d’impuissance américaine devant l’avancée de la colonisation, avec notamment 20 000 nouveaux colons au-delà de la barrière de sécurité, depuis l’élection de Barack Obama en 2008. John Kerry a précisé qu’il avait eu, dans ses fonctions, 130 heures de conversation, pour un total de 375 entretiens officiels, avec Benyamin Nétanyahou.
Mais la droite israélienne s’est engagée dans une voie opposée aux négociations de paix. M. Kerry a rejeté l’idée que le conflit avec les Palestiniens pouvait être relégué à l’arrière-plan des relations régionales de l’Etat hébreu. « Il n’y aura pas d’avancée et de paix séparée avec le monde arabe sans un processus palestinien et une paix palestinienne, a-t-il dit. Chacun doit comprendre cela. C’est la dure réalité. »